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Yoga : L'Histoire du Prānāyāma (exercices respiratoires)

Ariane Albecker • avr. 19, 2021

Pourquoi la respiration est-elle si importante dans le Yoga ?

Quand on pense au Yoga sans forcément connaître cette pratique, on pense avant tout à des postures incroyables ou alors à des personnes "zen" qui passent leur temps à méditer. Ce sont des clichés que j'entends très souvent ! Mais quand on commence à pratiquer, on apprend très vite que l'un des fondements de la pratique, c'est la respiration. En tout cas, c'est une des premières choses que j'apprends à mes élèves. On commence très simplement par observer comment nous respirons au quotidien et comment approfondir la respiration de manière consciente. Puis, petit à petit, j'emmène mes élèves vers des exercices respiratoires plus complexes et subtiles. Mais quelle est la raison qui fait que l'on s'intéresse autant au souffle ? Pour mieux répondre à cette question, je vous invite à un petit voyage à travers l'histoire du Prānāyāma



Une histoire très ancienne



La respiration a toujours été au cœur des préoccupations des yogins. Déjà, dans les Vedas (les textes de l’hindouisme les plus anciens), il est fait mention du Prāna. Le Prāna est parfois compris comme une énergie préexistante à toute forme de matière et circulant en elle. Le Prāna est dont aussi considéré comme la respiration (et parfois comme un peu des deux !).


Dans l’
Atharva Veda (environ -1000 av. J.-C.), il est pour la première fois fait mention de ce fameux Prāna avec un lien très fort à la respiration. Voici un très joli extrait : 


“Révérence à toi
Prāna, à qui tout l’Univers est assujetti, qui est le maître de tous, sur qui tout est soutenu.

Révérence à toi Prāna, quand tu inspires, quand tu expires.

Révérence à toi quand tu es tourné vers l’extérieur, révérence à toi quand tu es tourné vers l’intérieur.

Prāna habille les créatures, tel un père pour ses fils aimés.

Prāna, vraiment, est le maître de tout, tout ce qui respire et tout ce qui ne respire pas. 

Ô Prāna, lie-toi à moi, afin que je puisse vivre.”



Celui qui maîtrise sa respiration, maîtrise son mental



Dans les Upanishad, un peu plus tardivement (vers -300 av. J.-C.), les pratiques ascétiques, accessibles à tous (enfin surtout aux gens très motivés !) sont développées. Cet accès à "tout un chacun" (je mets ici des guillemets car l'ascétisme s'adresse avant tout aux hommes. Les femmes sont globalement exclues de ces pratiques, jusqu'à des périodes plus tardives) à des pratiques spirituelles est en réalité assez révolutionnaire pour l'époque. En effet, dans le Brahmanisme qui était prôné par les Vedas, les prêtres étaient les seuls à pouvoir avoir une pratique spirituelle. Dans ces textes, on va trouver les premières techniques respiratoires, même si elles sont décrites de manière très lacunaire : restriction du souffle et expiration par la narine gauche (Svetāsvara Upanishad). Mais ce qui est beaucoup plus intéressant, c’est que ce sont dans ces textes que l’on va trouver une idée très importante dans le Yoga et que l’on applique encore aujourd’hui dans notre pratique : celui qui maîtrise son souffle, maîtrise son mental. 


À part cette restriction du souffle et l'expiration par la narine gauche, on a très peu d’indices sur ce que pouvaient pratiquer exactement les ascètes qui souhaitaient contrôler leur souffle pour contrôler leur mental. Mais on sait que ces techniques existaient et étaient assez précises puisque le Bouddha lui-même les a expérimentées lorsqu’il vécut dans la jungle avec d’autres ascètes avant de devenir le Bouddha. 


Le Prānāyāma pour Patañjali



On pense souvent que le Prānāyāma apparaît avec les Yoga Sutras de Patañjali (environ 200/300 ap. J.-C.). Mais en fait, ce n’est pas tout à fait vrai. En effet, le Prānāyāma fait partie des huit membres décrits par Patañjali pour parvenir à la Kaivalya (la libération ultime) mais dans le texte, aucun exercice respiratoire précis n’est décrit. Il s’agit plutôt de parvenir à l’immobilité du souffle (le mot Prānāyāma signifie d’ailleurs en sanskrit  “discipline / restreinte" du Prāna donc de “l'énergie du souffle”). Voici un extrait du texte de Patañjali : 


II.49 à 53 :


“Par un effort de détente, le flot de l’inspiration et de l’expiration peut être amené à l’immobilité; cela est appelé la régulation du souffle.

Alors que les mouvements de chaque respiration s’apaisent - observés d’un point de vue de la durée, du nombre, de la zone de concentration - le souffle devient spacieux et subtil. 

À l’aube de la réalisation, la distinction entre l’inspiration et l’expiration disparait.

Alors le voile s’envole de la lumière de l’esprit.

Et l’esprit est alors prêt pour la concentration (Dharana).”


Ainsi, lorsque Patañjali parle du
Prānāyāma, il évoque une pratique probablement assez simple de contrôle du souffle. Bien plus simple que les Prānāyāma complexes qui seront amenés par le Tantrisme et que nous pratiquons encore aujourd’hui.




Complexification des pratiques respiratoires avec le Tantrisme



Le Tantrisme va apporter énormément à la pratique du Yoga. Dans cette branche spirituelle, une attention toute particulière au corps est donnée. Pour le Tantrisme, notre corps est le siège des polarités solaires et lunaires, masculines et féminines. Le souffle symbolise ces différentes polarités. La narine gauche est ainsi associée à la Lune (Pingala) et la narine droite au soleil (Ida). En unissant ces deux aspects à travers, notamment, des Prānāyāma intenses, on peut alors parvenir à la libération.


Des textes beaucoup plus tardifs issus du Tantrisme vont ainsi compiler des techniques respiratoires plus complexes. Par exemple, dans la Hatha Yoga Pradīpikā (XVe siècle), des pratiques telles que les rétentions du souffle, Ujjayi, Shitali (la respiration à travers la langue), Bhrāmari (respiration de l’abeille), Bhastrikā (respiration du tisonnier) ou Kapālabhāti (respiration du crâne resplendissant) sont décrites très en détail. C’est donc le Tantrisme qui va apporter toutes ces techniques différentes de respiration que l’on pratique encore aujourd’hui. 


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